Steve Guerdat, le temps de la félicité
Après une victoire dans le CSI 5* de Grimaud avec Venard de Cerisy, Steve Guerdat a remis le couvert en Italie ce week-end en s’emparant du Grand Prix de Gorla Minore aux commandes cette fois d’Uranie de Belcour. Le Suisse, indétrônable numéro 1 mondial, surfe sur une longue période faste ou l’accomplissement professionnel se nourrit d’un bonheur familial (mariage, naissance) que lui, pourtant si réservé, n’hésite pas à afficher.
Les photos ne mentent jamais. Celle réalisée à Gorla Minore par Massimo Argenziano pour Cavallo Magazine en dit beaucoup sur le Guerdat, cru 2021. On l’a connu sombre, regard noir et mâchoires serrées. Le cliché pris en Italie révèle à l’inverse un homme décontracté et souriant, la veste rouge posée sur l’épaule et la casquette Rolex vissée sur la tête, sponsor oblige. Un athlète conscient de sa maîtrise technique et de la qualité de son piquet qui semble avoir évacué les pressions négatives liées en partie à l’importance des enjeux économiques à ce niveau de compétition.
Au moment où la France célèbre le bicentenaire de la mort de Napoléon, les historiens aiment à rappeler l’Empereur croyait en sa destinée, sa bonne étoile mais s’intéressait aussi à celle des officiers avant d’en faire des généraux. «Fort bien, mais a-t-il de la chance ? » s’enquerrait le chef de guerre. A cette sélection-là, Steve Guerdat aurait été nul doute promu maréchal d’Empire. Les jeux de Tokyo dans quelques mois se présentent sous les meilleurs auspices. Le Jurassien a goûté à l’or le 8 août 2012 aux JO de Londres avec Nino des Buissonnets. Ce goût-là ne s’oublie pas. La soif de l’or fait basculer les esprits les plus solides. Tokyo en 2021, Paris en 2024, la route est toute tracée, les échéances clairement identifiées. Ne reste plus qu’à les cocher.
Sur son nuage, Steve Guerdat donne l’impression de pouvoir gagner toutes les épreuves sans ne plus être lié à un cheval en particulier. En 2017, il s’est acheté ses propres installations à Elgg dans le canton de Zurich. Rien en soi d’ostentatoire mais du beau et du fonctionnel, «un véritable paradis pour les chevaux» devait-il déclarer. Si Steve Guerdat a trouvé son Ève et croqué la pomme, il demeure néanmoins dans le paradis qu’il s’est soigneusement construit. Ce bonheur et cette réussite font plaisir à voir. «Pourvu que ça dure» disait Létizia Bonaparte la mère de Napoléon avec son accent corse en parlant des succès militaires de son impérial rejeton. C’est tout le mal que l’on peut souhaiter à Steve Guerdat dont le seul défaut, s’il faut en trouver serait, au pire, de ne pas être français.