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Hubside jumping : l’envers du décor

Au départ, c’est une belle histoire. Une réussite professionnelle exceptionnelle comme on en voit fleurir outre-Atlantique. Sauf que cette fois, c’est dans la Drôme. Fils d’un couple modeste, Sadri Fegaier est aujourd’hui à 41 ans, la 54ème fortune hexagonale, à la tête d’un groupe de 2400 salariés avec un chiffre d’affaire d’un milliard d’euros. Si ce nom ne vous dit rien, vous connaissez pourtant ses propriétés : le Haras des Grillons, le Jumping de Valence et désormais le prestigieux Hubside Tour, solidement implanté à Grimaud. Cette proximité de Saint Tropez n’est pas un hasard. L’argent coule à flots dans le Hubside Tour où rien n’est trop beau pour attirer l’élite des cavaliers mondiaux dans le meilleur environnement possible. Mais si l’argent n’a pas d’odeur, il a des origines qui intéressent la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et l’UFC-Que Choisir.

Quand on n’a pas grand-chose en poche mais qu’on est un garçon débrouillard et intelligent, la téléphonie offre l’occasion de gagner beaucoup d’argent. Le site LSA consacré au milieu du commerce et de la distribution, ne s’y est pas trompé et dressait dernièrement un portrait élogieux de la formidable ascension sociale de Sadri Fegaier, devenu cavalier sur le tard. C’est à retrouver sous la plume de Magali Picard. L’article se conclut toutefois avec une « ombre au tableau ». Cette amende de 10 millions d’euros de la DGCCRF pour pratiques commerciales trompeuses à la suite du millier de plaintes déposée par des consommateurs mécontents. Personnage avenant au regard clair, Sadri Fegaier interrogé par Magali Picard balaie pourtant d’un revers de main cette mauvaise publicité « Cela fait partie des aléas des grands groupes, il faut être très vigilant quand on gère beaucoup de clients. » La réussite a parfois des arcanes tortueuses.

Du côté de l’UFC-Que Choisir, on prend les choses très au sérieux. Le 21 avril dernier, l’association de consommateurs publiait sur son site un article à charge. En résumé, il est reproché à la SFAM (la société mère) non seulement de ne pas avoir corrigé son système de vente d’assurances à l’origine de la forte amende mais, d’avoir étendu la pratique à son réseau de magasins, les Hubside store. « Chaque jour, des consommateurs sortent de boutiques de télécoms avec, en poche, des contrats SFAM dont ils n’ont aucune utilité. À aucun moment, ils n’imaginent que le relevé d’identité bancaire qu’ils viennent de fournir et la signature qu’ils ont apposée sur une tablette vont mettre en route une série de prélèvements bancaires qu’ils auront toutes les peines du monde à faire cesser » explique dans son papier Cyril Brosset, le journaliste d’UFC-Que Choisir.

Le mécanisme détaillé par l’UFC s’avère redoutable pour les consommateurs.« Alors qu’auparavant votre signature entraînait votre adhésion à un contrat d’assurance d’un montant mensuel de 15,99 €, désormais, elle déclenche d’office la souscription d’un pack de quatre services et autant de prélèvements. Outre l’assurance multimédia, aujourd’hui baptisée Celside et coûtant 24,99 € par mois, vous avez trois autres contrats sur les bras: Hubside, un service de création de site Internet à 44,99 € par mois, Cyrana, un programme de cashback vendu 89,98 € par mois, et Serena ».

Hubside, Celside, des marques omniprésentes à Grimaud car sans doute de généreux partenaires financiers indispensables à la tenue d’un événement hippique de ce niveau. L’affaire  ne serait pas gênante si le business de ces sociétés ne reposait sur des contrats souscrits souvent en toute méconnaissance de cause et dans tous les cas résiliables très difficilement. Or, à lire l’UFC, la résiliation semble relever d’un parcours du combattant volontairement rendu complexe … et pas toujours suivie d’effets avec pour corollaire des prélèvements bancaires impossibles à suspendre pour des clients parfois aux faibles revenus, pour lesquels chaque euro compte.

En raison des plaintes qui continuent à s’accumuler à l’UFC, le dossier semble loin d’être clos et devrait connaître des rebondissements judiciaires. Il n’est pas sûr en tout cas que pour le grand public, l’image du jumping de haut niveau, de plus en plus accolée à un luxe ostentatoire à l’américaine, en sorte grandie.  Encore faudrait-il il est vrai que ce dossier, comme le jumping, sortent de l’entre-soi dans lequel ils sont soigneusement cantonnés.

Sadri Fegaier (au premier plan), cavalier, propriétaire et organisateur, met avec succès ses sociétés au profit de sa passion, le jumping.

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