Le français oublié des Masters de Paris
Christophe Ameeuw a un don certain. Celui des affaires et de transformer le plomb en or. Cet autodidacte belge a un parcours impressionnant avec de belles réussites à la clef : les Ecuries d’Ecaussines qu’il a totalement transformé et internationalisé sans oublier, EEM la société qu’il a créée en 2009, devenu depuis un acteur incontournable du saut d’obstacles de haut niveau. Après avoir relancé le jumping de Paris rebaptisé un temps Gucci Masters il a créé son propre circuit des Longines Masters (Los Angeles, Hong Kong, New York, Lausanne et Paris). Un vraie réussite financière et sportive. Dommage que la grande lessiveuse de la mondialisation et des affaires ait gommé au passage les identités culturelles des pays d’accueil. Paris en est une belle illustration. La ville-lumière sans la langue française est-elle encore Paris ? Parti pris.
L’internationalisation des sports équestres et une belle chose en soi mais la France n’est pas un pays ordinaire. En raison de son passé, de sa culture et des valeurs universelles qu’elle porte depuis la révolution de 1789. Or, la langue, on le sait bien n’est jamais quelque chose d’anodin. Elle reflète un rapport de force entre différentes façons d’appréhender le monde. Dans le mouvement de mondialisation actuelle, de standardisation des cultures, pour ne pas dire de pasteurisation au sens d’aseptiser, la France résiste ou tente de résister face au rouleau compresseur anglo-saxon.
Dans ce combat, la défense de la langue est essentielle. Comme l’écrivait dernièrement l’académicien Jean-Marie Rouart, « Avec cette langue dont nous perdons la maîtrise, ce sont aussi les idées qu’elle véhiculait qui vont se dissiper et perdre de leur influence. C’est tout l’apport de ce qu’il faut bien appeler, certes un peu gravement, l’âme française, ce message si original d’esthétique et d’éthique façonné par les siècles qui est appelé à disparaître ».
Pour vendre l’âme internationale de Paris aux étrangers, il en faudra un peu plus que la simple reproduction de la tour Eiffel sur un rectangle de bac à sable dans un hall d’exposition aussi impersonnel que celui de Villepinte. Alors quand on y rajoute des anglicismes à gogo et un mauvais globish, on ne fait que servir une soupe tiède et sans goût. Comme un air de contrefaçon qui n’est pas sans rappeler ces souvenirs vendus à la sauvette sur les lieux touristique parisiens et fabriqués par des petites mains exploitées en Asie du Sud-Est.
A l’inverse, l’équitation doit être l’occasion de mettre en avant des filières d’excellence et une culture, française en l’occurence, célébrée dans le monde entier. Le Saut Hermès à cet égard constitue un exemple à suivre parce qu’il s’inscrit dans une histoire, un patrimoine, une tradition.
Question circuit, Jan Tops et le Global Champions Tour paradoxalement semblent également l’avoir compris en choisissant des lieux d’exception pour l’accueil des compétitions, en essayant de vendre un peu de l’esprit du pays hôte.
De grâce ne vendons pas du jumping de haut niveau comme on vend des hamburgers dans le monde entier à travers des franchises et des produits standardisés. Essayons plutôt de mettre en avant des cultures différentes, pluri-centenaires, entre les hommes et sa plus fidèle conquête, le cheval.