Polémique

Jumping : la menace végan n’est pas fantôme

Peter Janssen en action à Bordeaux

La menace n’a rien de fantôme. Dimanche 5 février, deux activistes végans ont interrompu le déroulement du Grand Prix Audi du jumping de Bordeaux en pénétrant sur la piste et en bousculant quelques obstacles. Les perturbateurs ont vite été appréhendés et se sont laissés évacuer sans défense sous les quolibets et les insultes d’une grande partie des spectateurs. Anecdotique ? Pas vraiment. Explications.

Tout se déroule au mieux dans le parc des expositions de Bordeaux ce dimanche. L’étape Coupe du monde s’est déroulée la veille au soir sans encombre. Les travées sont archi-pleines tout comme le salon du cheval en annexe du Jumping. Les organisateurs pensent déjà à fin de ce week-end éprouvant. Ils ne sont pas encore au bout de leur peine avec un grain de sable qui va venir se glisser dans cette mécanique bien huilée. L’incident sera heureusement sans grandes conséquences. 

Le Grand Prix a débuté à 14h. Seize concurrents sont déjà passés. Le Néerlandais Maikel van der Vleuten est en piste. Il vient de commencer son parcours avec Luigi d’Eclipse. Soudain, un clameur traverse la foule. Deux individus viennent d’entrer sur la piste. Un homme torse nu, une femme en soutien-gorge avec des inscriptions sur le corps « vegan strike group » et une mini banderole : « stop horse abuse ». Maikel van der Vleuten arrête son cheval et regarde, médusé, la scène qui se déroule sous ses yeux. Celle-ci tourne au croquignolesque. L’organisation, en toute logique n’a pas prévu de personnel de sécurité pour la piste. Les préposés de Toubin Clément notamment prennent les choses en main. L’un d’eux, Pierre Cotton, par un habile croche-pied réalisé avec son râteau de fonction, fait chuter l’une des activistes et la sort de la piste manu militari. Le deuxième individu est évacué sans difficultés. Le jury redonne le départ au concurrent interrompu. Déconcentré le couple sort avec 10 points de pénalités. Fin de l’histoire, côté scène.

Côté coulisses, les deux activistes sont placés en garde à vue à l’hôtel de police de Bordeaux-Mériadeck pour introduction dans une enceinte sportive visant à perturber le bon déroulement de la compétition. Ils font l’objet d’une comparution immédiate dès le lendemain, mardi. 

Planète CSO, a pris contact avec les deux militants afin de connaître leurs motivations. La femme est une Française de 56 ans, Christina résidant en Belgique. L’homme est un néerlandais de 36 ans, Peter Janssen. Il se présente comme le porte-parole du Vegan Strike Group, un groupe informel de défense de la cause animale actif en Europe. Globalement, le Vegan Strike Group réfute la thèse selon laquelle les chevaux à ce niveau de compétition seraient des athlètes de haut niveau qui recevraient les meilleurs soins. Il considère que les sports équestres ne sont pas sans souffrance pour les chevaux qui sont contraints à des performances extrêmes avec des conséquences douloureuses. Le Vegan Strike Group estime que les chevaux ne devraient pas être utilisés pour ce qu’il qualifie d’industrie du sport et du divertissement. Leurs interventions visent donc à défendre le droit des chevaux et à faire prendre conscience au public de la souffrance des chevaux avec des entraînements durs à l’aide de moyens coercitifs, des transports stressants et globalement d’une vie contre-nature. Au-delà des chevaux, ce groupe d’activistes prétend défendre tous les animaux dans l’industrie du divertissement (zoos, corridas, delphinariums…).

Depuis plusieurs années maintenant la FEI a bien pris conscience que l’évolution des sociétés occidentales nécessitait de revisiter la relation à l’animal. De nombreuses actions ont été accomplies en faveur du bien-être animal qui est aujourd’hui au coeur des préoccupations de la FEI. Il n’empêche qu’un dialogue de sourds s’installe avec des fractions radicales convaincues de la justesse de leur cause. Et il est vrai que si des progrès ont été accomplis notamment à haut niveau, en raison aussi des réseaux sociaux et des téléphones portables, il reste des zones d’ombre notamment sur les méthodes employées à la maison, à l’égard des regards.

L’incident de Bordeaux ne peut être considéré comme isolé. Les organisateurs de compétitions vont devoir gérer ce risque et essayer simultanément de faire preuve de beaucoup de pédagogie car Peter Janssen prévient, d’autres actions seront menées dans les mois à venir. Le Vegan Strike Group qui revendique des militants dans différents pays du monde entier, notamment en Europe et en France, était déjà intervenu à plusieurs reprises, avec plus ou moins de succès, dans des manifestations principalement en Belgique et aux Pays-Bas sur le sujet des chevaux. La France, l’un des principaux pays organisateurs de CSI est particulièrement visée, d’autant que Paris accueillera les Jeux Olympiques en 2024.

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