Uliano Vezzani : « On ne doit pas casser les chevaux en tant que chef de piste »
Son nom sonne comme une promesse de soleil. Il vient de souffler sa soixantième bougie le 13 février. Uliano Vezzani est l’un des chefs de piste les plus en vue du jumping mondial, un incontournable du circuit 5*. Le Maestro est aussi un italien comme on les aime : prévenant et qui parle avec les mains. Dans le microcosme du haut niveau il reste obstinément abordable, capable d’entendre toutes les critiques et de leur répondre avec élégance, posément, dans un français impeccable quand elles sont exprimées dans la langue de Molière.
Avec une quarantaine d’événements internationaux par an à son actif, ce chef de piste international pourrait avoir la grosse tête. Il se contente d’avoir un peu de corpulence. Ancien instructeur fédéral, il a fait du bien être des chevaux sa marque de fabrique. Pas facile dès lors de résoudre l’équation délicate de tout chef de piste. A savoir, sélectionner les meilleurs couples sans mettre les montures dans le rouge ni mettre en péril les pilotes. Et plus ça va, et plus l’exercice s’avère difficile en raison de la hausse globale du niveau tant du côté des équidés que des cavaliers.
Cette tendance s’est confirmée cette saison. Plusieurs Grand Prix se sont conclus avec une nombre élevé de participants au barrage. Pas bon du tout. Ca tue le suspense, ça démotive les cavaliers et ça pénalise les chevaux qui malgré une bonne prestation de départ repartent bredouilles, sans classement et donc sans prix.
Le Grand Prix Coupe du Monde de Bordeaux, début février, a parfaitement illustré cette situation. Interrogé en conférence de presse sur son loupé, Uliano Vezzani a répondu sans détour : « il est clair que dix-neuf cavaliers dans un barrage, c’est beaucoup. La piste est grande, les chevaux sautaient bien… J’ai mal calculé quelque chose. Je n’ai pas beaucoup forcé sur la largeur des oxers, ce que j’aurais pu faire. Je pensais que certains obstacles allaient faire plus de fautes.
Face à la suggestion d’un journaliste de raccourcir le temps accordé pour pousser les couples à la faute, on a senti poindre un début d’énervement, très latin, chez l’homme de l’art. « Honnêtement. Concernant le chronomètre imparti, ce n’est pas ça qui doit faire les sélections, c’est le parcours. On ne doit pas casser les chevaux en tant que chef de piste. Des fois il y a des barrages à cinq, des fois à vingt. Ce n’est pas grave. Quant à la FEI qui pourrait changer de vitesse c’est une autre question ». Avant de concéder dans un demi soupir : » Notre métier n’est vraiment pas facile ! ».
Nous avons reposé la question à froid à Uliano Vezzani à son retour des Longines Masters de Hong Kong. Le chef de piste a réexpliqué qu’il n’aime pas retoucher le temps une fois que la compétition a commencé « parce que c’est injuste pour les concurrents qui sont parties au début« . Dans le cas de Bordeaux Uliano Vezzani estime que la distance mesurée par lui-même et par son assistant en présence du Président du Jury était bonne et que les cavaliers n’avaient pas de nombreuses occasions pour faire d’autres trajectoires. De ce fait, le temps accordé relevait de l’application simple du rapport entre la distance mesurée et la vitesse à respecter fixée par le règlement de la FEI à savoir, 350 m/mn.
Le lendemain de son défaut d’appréciation de la qualité du plateau engagé dans l’épreuve Coupe du Monde de Bordeaux, Uliano Vezziani s’était rattrapé en livrant un Grand Prix très sélectif … par sa technicité mais aucunement par le chronomètre.