Dopage : une sanction exemplaire qui doit faire jurisprudence

Il y a pire que le dopage « simple ». C’est celui qui donne lieu à d’atroces souffrances à un animal et, qui au bout du chemin, se termine par son euthanasie. Signe que les temps changent et que les impunités s’érodent, la sanction prise par la FEI à l’encontre du Sheik Abdul Aziz Bin Faisal Al Qasimi (EAU) dans le cadre de l’affaire Castlebar Contraband, nom de son cheval qui s’était fracturé un canon lors du CE1* de Fontainebleau (FRA) le 15 octobre 2016, fera date et on l’espère jurisprudence.
Il y a bien sûr la sanction financière. 17 500 francs suisses d’amende et 15 000 francs suisses pour les frais de procédure soit au total l’équivalent de 30 074 €. La somme paraît rondelette pour le commun des mortels mais ce montant constitue un confetti dans la fortune de membres de monarchies pétrolières. Il est donc loin d’être à lui seul dissuasif. Restait donc la seule vraie menace, celle de la suspension. Cette fois la main des juges n’a pas tremblé. Les considérations politiques sont restées au vestiaire et la condamnation, sans équivoque, est tombée : 20 ans. Deux décennies de suspension soit chez un athlète, une éternité, la fin de sa carrière sportive.
Dans le machiavélisme et la cruauté, l’homme n’a pas son pareil. La ficelle est bien connue : administrer un produit, en l’espèce de la Xylazine, un sédatif, analgésique et relaxant musculaire, qui permet abaisser le rythme cardiaque peut être très utile en endurance en permettant de passer les contrôles vétérinaires.
Les effets secondaires sont terribles comme l’a rappelé à la barre le directeur vétérinaire de la FEI. Le Dr Göran Åkerström, a expliqué que le blocage des nerfs supprime la « fonction protectrice très fondamentale de la sensibilité » et augmente le risque de blessure catastrophique. Concrètement, faute de signal de douleur (et donc de boiterie), le cheval s’expose à une fracture de fatigue. C’est ce qui s’est passé comme pour d’autres avant lui pour Castlebar Contraband dont le canon avant droit s’est brisé dans une fracture ouverte lors de l’épreuve à Fontainebleau.
L’autopsie a révélé l’apparition de lésions multiples avec un emplacement très ciblé, ce qui démontre que le cheval a été bloqué nerveusement (désensibilisé) à l’entraînement, et à la fois avant et pendant la compétition. Cette désensibilisation, associée à l’arthrose de l’articulation du boulet avant droit, a entraîné des fractures de stress qui ont finalement causé la blessure catastrophique qui ne relève pas du hasard mais d’une pratique répétée.
Différence culturelle peut-être ou simple arrogance de liée à sa fortune et à son rang, l’idée même que les chevaux pourraient être des mobylettes que l’on change après les avoir cassés est inadmissible. Tout à l’inverse, le droit après la science a établi que ce sont des êtres vivants doués de sensibilité.
Le tribunal de la FEI en a tiré toutes les conclusions en condamnant le Sheik Abdul Aziz Bin Faisal Al Qasimi aux sanctions les plus sévères de l’histoire de la FEI. Les 20 ans de suspension se décomposent en effet en 18 ans pour la maltraitance des chevaux et deux ans pour la violation des règles sur le dopage.
« C’est un très bon résultat pour le bien-être des chevaux et la lutte contre le dopage dans les sports équestres« , s’est réjoui le directeur juridique de la FEI, Mikael Rentsch. « Nous sommes très heureux de voir une sanction aussi forte prononcée par le Tribunal de la FEI qui constitue un avertissement sévère pour tous les compétiteurs. Le Tribunal ne tolérera pas les cas d’abus sur les chevaux« .
Avec communiqué.